Grippe non compliquée et syndromes grippaux

Définition

La grippe est une maladie virale contagieuse due à un myxovirus influenzae dont on connaît trois types A, B, C et plusieurs sous-types. Bien que ce virus confère l'immunité par la sécrétion d'anticorps contre l'antigène d'enveloppe, un même individu peut présenter plusieurs fois au cours de vie les symptômes de la grippe, parce que ce virus est susceptible de muter son capital génétique lors de sa réplication et qu'il n'existe pas d'immunité croisée entre les différents sous-types.

Cette maladie évolue sur un mode épidémique, les myxovirus du type A allant parfois jusqu'à provoquer de véritables pandémies dont certaines sont restées célèbres comme la "grippe espagnole" en 1918, la grippe asiatique en 1957-1958 ou la "grippe de Hong Kong" en 1968. D'autres virus, myxovirus, adénovirus du groupe ECHO sont responsables de tableaux cliniques fort voisins étiquetés "syndromes grippaux".

Après contamination d'un sujet, l'expression clinique spontanée de cette maladie infectieuse est caractérisée successivement par :

1. une incubation silencieuse de 2 à 5 jours ;
2. une invasion fébrile, brutale et courte, avec des frissons, une congestion du visage et/ou des courbatures ;
3. une phase d'état de plusieurs jours avec de la fièvre et une tachycardie, des sueurs, des céphalées intenses parfois accompagnées de photophobie, des courbatures, un catarrhe de la sphère O.R.L. et une diminution de la sthénicité. L'évolution de cette phase d'état se déroule le plus souvent en deux temps. Pendant cette phase d'état, peuvent survenir des complications respiratoires, laryngées, digestives, péricardiques et/ou neurologiques ;
4. une défervescence s'accompagnant volontiers d'une toux durable ;
5. une convalescence avec une période d'asthénie plus ou moins longue, pouvant durer plusieurs semaines.

Quand elle est utilisée au cours des états aigus, la thérapeutique homéopathique permet d'observer un raccourcissement de la durée de chacune des phases de la malade infectieuse, et ce d'autant plus que le traitement est mis en route plus tôt ; les guérisons seront donc particulièrement rapides si les médicaments sont administrés en début de maladie, les réactions du sujet contaminé faisant alors disparaître le syndrome infectieux en quelques heures. Compte tenu de la propagation de la grippe selon le mode épidermique, il est utile d'essayer de protéger les sujets non atteints en leur conseillant un traitement homéopathique préventif, facile à suivre.

La gamme des médicaments homéopathiques utilisés est différente selon le moment où est instaurée la thérapeutique et l'étude qui va suivre se propose de déterminer les médicaments en fonction du stade de la maladie où le sujet est examiné pour la première fois.

Période d'incubation

Cette phase étant cliniquement silencieuse, on utilise, s'il y a risque de contage : Oscillococcinum ® à raison d'une dose que l'on répète deux fois à six heures d'intervalle (soit trois doses en tout).

Médicament préparé à partir d'un autolysat aseptique filtré de cœur et de foie de canard de Barbarie, sa très grande richesse en acides aminés est vraisemblablement responsable de la potentialisation des mécanismes de défense de l'organisme contre les agents infectieux en général et les virus en particulier.

Ainsi, dans la quasi-totalité des cas, le syndrome grippal n'apparaîtra pas.

Période d'invasion

Elle peut être brutale ou plus progressive.

A - PHASE D'INVASION BRUTALE

Elle est caractérisée par l'installation d'un syndrome fébrile aigu faisant choisir entre Aconitum et Belladonna.

Aconitum napellus

L'expérimentation pathogénétique de l'aconit engendre après un frisson, une hyperthermie élevée, à début très rapide avec éréthisme cardiaque, rougeur et chaleur de la peau qui est sèche, soif vive (pour de l'eau froide) et agitation sthénique. Ce tableau se rencontre souvent après un refroidissement brutal et débute volontiers la nuit (vers minuit ou 1 heure du matin), réveillant le malade qui présente alors une certaine anxiété. On peut observer une otalgie réflexe et de la toux.

Prescrire en moyenne dilution - 7 ou 9 CH - puisqu'il existe en même temps des symptômes locaux et des symptômes généraux, soit une dose, soit cinq granules répétés toutes les demi-heures ou toutes les heures jusqu'à l'apparition des sueurs qui indiquera alors :

Belladonna

L'expérimentation pathogénétique de la belladone engendre une hyperthermie à début très rapide, évoluant par clochers, avec éréthisme cardiaque et congestion céphalique accompagnée de douleurs pulsatives, rougeur et chaleur radiante de la peau, sueurs surtout du visage ; on note aussi une soif vive par sécheresse de la bouche et des autres muqueuses (parfois dysphagie), une photophobie par mydriase, une hyperesthésie sensorielle (au bruit, au toucher, aux secousses) et une agitation avec possibilité de délire ou un abattement.

En pratique, le tableau pathogénétique de Belladonna étant très voisin de celui d'Aconitum, mais n'en différant essentiellement que par la présence de sueurs, l'indication de Belladonna suit celle d'Aconitum dès l'apparition de la transpiration.

Prescrire Belladonna 7 ou 9 CH (puisqu'il existe des symptômes locaux et généraux), par prises de cinq granules, répétées toutes les heures environ. Espacer progressivement selon l'amélioration des symptômes.

B - PHASE D'INVASION PROGRESSIVE

Cette phase est généralement caractérisée par une sensation de malaise inaugural avec frissons, céphalées, courbatures, toux. Il faut alors prescrire : Oscillococcinum ®, une dose dès que possible, répétée six et douzes heures plus tard, la première dose étant suivie une heure après de :

Sulfur un tube dose en 15 ou 30 CH. Si l'on veut utiliser une autre dilution, il faut impérativement vérifier l'intégrité des tympans (surtout chez l'enfant). Les basses dilutions de Sulfur risquent en effet de favoriser l'évolution d'une otite sous-jacente.

La phase d'invasion est le dernier stade auquel la rétrocession de la symptômatologie peut être obtenue en quelques heures et nous insistons sur l'importance de débuter le traitement homéopathique dès l'apparition des premiers symptômes.

Période d'état

Le malade n'a pas encore bénéficié des médicaments homéopathiques au cours de la période d'invasion et le syndrome grippal est installé. En fonction des symptômes apparus chez le malade, il faut choisir les médicaments parmi :

Gelsemium

Ce médicament est indiqué chez un malade présentant un syndrome fébrile adynamique avec fièvre élevée d'installation progressive, céphalée frontale et occipitale, abrutissement, frissons pouvant aller jusqu'aux tremblements suivis de sueurs.

Ce malade fébrile n'a pas soif ; il se plaint de fatigue et de courbatures ; il peut avoir le visage cramoisi. Prescrire en 7 ou 9 CH, cinq granules toutes les heures ou toutes les deux heures suivant l'acuité du cas. Espacer suivant amélioration.

Rhus toxicodendron

Ce médicament est indiqué chez un malade présentant un syndrome fébrile adynamique avec fièvre élevée d'installation progressive, accompagnée de courbatures et de douleurs péri-articulaires avec enraidissement ; la modalité d'amélioration par le mouvement, caractéristique de cette pathogénésie, se traduit par le besoin permanent de bouger dans son lit, avec l'impression de ne jamais y trouver de place confortable. Le malade recherche la chaleur, enfoui sous les couvertures, y transpire abondamment et frissonne ou tousse dès qu'il se découvre, ayant alors l'impression qu'on lui verse dessus de l'eau glacée.

La soif est vive pour de l'eau ou du lait froids. On peut observer une rougeur à la pointe de la langue et parfois une poussée d'herpès péri-buccal. dans ce dernier cas, prescrire Rhus toxicodendron en 15 CH, sinon, prescrire en 7 ou 9 CH, cinq granules toutes les heures ou toutes les deux heures suivant l'acuité du cas. Espacer suivant amélioration.

Eupatorium perfoliatum

Médicament de syndrome fébrile adynamique avec douleurs musculaires et osseuses, céphalées et surtout douleurs oculaires aggravées par la pression des globes. Souvent rhinite et toux trachéo-bronchique associées, aggravées la nuit, couché sur le dos, en inspirant de l'air froid. Le malade est assoiffé d'eau froide.

Prescrire en 7 ou 9 CH, cinq granules toutes les heures ou toutes les deux heures suivant l'acuité du cas. Espacer suivant amélioration.

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Ces trois médicaments ont des pathogénésies qui recouvrent fréquemment la totalité des symptômes de la grippe ; aussi est-il de pratique logique et efficace de les prescrire chez le même malade en permutation régulière toutes les heures ou toutes les deux heures suivant l'acuité des symptômes.

Cependant, au cours de l'évolution d'un syndrome grippal, on peut observer des tableaux cliniques différents qui justifient l'emploi d'autres médicaments :

Bryonia alba

Ce médicament est indiqué devant des états fébriles continus ou rémittents, avec céphalées, courbatures, douleurs articulaires et toux sèche trachéale.

Tous ces symptômes sont aggravés par le mouvement, obligeant le malade à rester immobile dans son lit et à se comprimer les parois thoraciques au moment des accès de toux. Les sueurs sont huileuses ; la soif est vive et il reste un goût amer dans la bouche.

Prescrire en 7 ou 9 CH cinq granules toutes les heures ou toutes les deux heures.

Ferrum phosphoricum

Ce médicament est utilisé lorsque la fièvre est peu élevée. Le visage alterne entre pâleur et congestion, la peau est moite.

Il existe une tendance hémorragique se traduisant par la survenue d'épistaxis et une tendance à des phénomènes congestifs localisés : otalgie avec tympan inflammatoire ou toux de trachéite.

Prescrire en 7 ou 9 CH cinq granules toutes les heures ou toutes les deux heures, sauf en cas d'otalgie où l'on ne dépassera pas deux prises par jour.

Pyrogenium

Ce biothérapie est indiqué devant un syndrome fébrile où existe une dissociation du pouls par rapport à la température (le plus souvent pouls rapide pour une fièvre peu élevée). Le malade ressent des courbatures avec besoin de changer de position, comme s'il était dans un lit trop dur. L'haleine est fétide et la soif vive.

Prescrire en 7 ou 9 CH, cinq granules matin et soir.

Baptisia tinctoria

L'état fébrile adynamique s'accompagne de confusion mentale (ou de délire) et d'une atteinte du tractus digestif : haleine et diarrhée d'odeur fétide, soif vive. Il existe une sensibilité de la fosse iliaque droite avec caecum gargouillant.

C'est un médicament qui convient plus particulièrement aux syndromes grippaux avec participation digestive.

Prescrire en 7 ou 9 CH, cinq granules toutes les heures ou toutes les deux heures, suivant acuité des symptômes ; espacer suivant amélioration.

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Lorsqu'un traitement homéopathique est instauré à la période d'état, la défervescence du syndrome est obtenue en quelques jours sans qu'on observe de complication ou de grande asthénie post-grippale. La prescription d'Oscillococcinum ® est toujours possible mais, à ce stade, son efficacité est beaucoup moins évidente et régulière qu'aux périodes d'incubation ou d'invasion.

Période de convalescence

Le motif de la consultation d'un patient peut être une asthénie post-grippale parfois accompagnée d'une toux séquellaire dont il n'arrive pas à se débarrasser. Il est alors possible de faire réagir le patient en choisissant parmi les médicaments suivants :

Sulfur iodatum

Ce médicament semble favoriser une réaction décongestionnante et anti-inflammatoire qui correspond aux nécessités physio-pathologiques rencontrées à la fin des infections aiguës, en particulier à tropisme respiratoire.

Prescrire cinq granules de Sulfur iodatum 9 CH chaque soir au coucher jusqu'à disparition des symptômes. Dans le cas de toux rebelle, le médicament sera complémenté par ceux indiqués en cas de bronchites ou de pneumopathies. En cas d'asthénie post-grippale isolée, il sera complémenté par un ou plusieurs des médicaments suivants :

China rubra

Ce médicament correspond à l'asthénie physique avec pâleur et hypotension que l'on rencontre chez des patients ayant présenté une perte abondante de liquides organiques (sueurs ou diarrhée).

Prescrire en 7 ou 9 CH, cinq granules deux fois par jour jusqu'à disparition des symptômes (habituellement une dizaine de jours environ).

Kalium phosphoricum

Ce médicament est indiqué dans les cas d'asthénie psychique avec manque de goût pour le travail, le moindre effort intellectuel entraînant une grande fatigue. Par ailleurs le malade éprouve une grande hypersensibilité sensorielle et une certaine irritabilité.

La posologie est la même que celle de China ; si besoin, il faut alterner China et Kalium phosphoricum.

Avena sativa

En basse dilution, ce médicament a une action stimulante et apéritive. Il s'agit en fait plus d'une action phytothérapique qu'homéopathique, mais il est classiquement indiqué dans les asthénies post-infectieuses avec anorexie, souvent associé avec Alfalfa.

Par exemple, avant les repas du midi et du soir, garder quelques instants en bouche avant d'avaler 20 gouttes du mélange
Avena sativa 3 DH )
) ââ qsp 30 ml
Alfalfa 3 DH )
diluées dans un peu d'eau pure.

Influenzinum

Biothérapique préparé à partir du vaccin anti-grippal de l'Institut Pasteur, son emploi est justifié en fin de traitement lorsque persistent des séquelles de grippe : toux tenace, anosmie persistante, etc. On prescrit alors, à titre de médicament étiologique, un tube dose unique en 15 CH.

Traitement préventif

Chez les sujets à risques, le traitement homéopathique préventif de la grippe a l'avantage d'être dépourvu de toxicité chimique.

Chez ces patients présentant soit un état morbide chronique, soit des manifestations pathologiques répétitives, le meilleur traitement homéopathique préventif de la grippe se confond avec celui de la maladie chronique (voir "Possibilités en pathologie chronique"), auquel on ajoute une dose hebdomadaire ou bimensuelle d'Oscillococcinum ® pendant toute la saison froide.

Chez les autres, prescrire Oscillococcinum ® seul, à la même fréquence.

En stimulant les moyens de défense de l'organisme, ce traitement préventif permet d'étendre la protection vis-à-vis de tous les germes responsables de la pathologie infectieuse hivernale en général et de la pathologie virale en particulier.