Les domestiques étaient loués à l'année et négociaient leurs gages lors des foires de novembre et décembre. Les conditions de travail étaient vigoureusement discutées et soumises à une concurrence qui dépassait les frontières de la commune. On reconnaissait ainsi la richesse et l'importance d'une ferme à la valeur des domestiques et à leur nombre. Le Mélennec (7 domestiques), Poulduic (6) et Kervian (5) étaient en 1790 les fermes les plus prospères.
Certaines autres fermes, moins prospères, voire subsistant à peine, s'octroyaient une source de revenu complémentaire en prenant la garde d'un ou plusieurs nourrissons. Les enfants à garder venaient pour la plupart de la ville, et principalement de Quimper. Sur le recensement, cinq enfants en bas-âge ont été déclarés comme tels (leur nom de famille étant omis), et une dizaine d'autres nourrissons ont été également signalés.
Les journaliers (en breton : dewezhourien, ceux qui se louaient à la journée) étaient beaucoup plus dépendants à l'égard de la misère par rapport aux autres catégories sociales, surtout en temps de crise. Ces "gens de néant" représentaient en 1790 21% de la population rurale active d'Ergué-Gabéric.
Les professions artisanales ou autres n'étaient guère légion en 1790. Nous avons répertorié treize métiers dont un certain nombre avait un lien avec l'activité agricole. Les 46 artisans, parmi lesquels six seulement étaient basés au Bourg, représentaient à peine 8% de la population active.
Les potiers (4), dont certains étaient également cultivateurs
ou métayers, installés à Bec-a-Menez, Kervéguen,
Kervinic et Mesnaonic, occupaient une place à part. En effet la
terre argileuse d'Ergué-Gabéric attira de tout temps nombre
de potiers, ainsi que les faïenceries de Locmaria. M de Cambry remarqua
dans son "Voyage dans le Finistère en 1794 et 1795" de "petites
manufactures de grosse poterie et de vases de grai" sur le territoire d'Ergué-Gabéric.
Les meuniers (9) de Meil-Kergonan, Meil-Faou, Meil-Jet, Meil-Kerfort, Meil-Kernaou, Meil-Mezanlez, Meil-Coat-Piriou, Meil-Pouïl et Meil-Pont-ar-Marc'hat étaient suffisamment nombreux et dispersés pour moudre le grain apporté par les agriculteurs de la commune. Les deux moulins les plus florissants semblaient être ceux de Pont-ar-Marc'hat sur le Jet et Coat-Piriou sur l'Odet dont les meuniers étaient déclarés citoyens actifs, et où les domesriques étaient respectivement au nombre de deux.
Les aubergistes du Bourg (2), Goulé-quéau (1), Kerdévot
(1), la Ville-Neuve (1), Lostarguillec (1) étaient installés
dans la partie est de la commune, où ils subissaient sans doute
moins la concurrence de la ville de Quimper. Il est curieux de constater
que les auberges n'étaient pas forcément situées le
long des routes principales de Coray ou d'Elliant.
Un dernier mot à propose des "coureuses" de Kerellou, dont une était qualifié "d'imbecille" dans le recensement de 1790. Ces deux femmes exerçaient vraisemblablement le plus vieux métier du monde. En 1791, l'une d'elle, dite "fille de mauvaise vie", était l'objet d'une supplication dans laquelle le maire d'Ergué-Gabéric portait plainte au Directoire du district de Quimper pour les raison suivantes :
"1) elle n'est pas originaire de notre commune
2) elle a la vérole
3) elles se lave dans neuf fontaines dans la persuasion de se guérir, superstition
elle est de mauvais exemple
elle a eu un enfant
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* * *
En conclusion, l'activité de la population d'Ergué-Gabéric en 1790 était essentiellement agricole. Aux cultivateurs et métayers qui exploitaient avec peine et misère leur ferme s'ajoutait une population trois fois plus nombreuse de domestiques et journaliers qui louaient leur force de travail aux premiers. Les artisans et autres professions étaient largement minoritaires, pour la bonne raison que, dans les conditions difficiles de cette fin de 18e siècle, l'agriculture constituait une économie de subsistance.
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